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En 1998, le rap a généré en France un chiffre d’affaires d'environ 150 million d'euros. La France est le deuxième marché au monde derrière les Etats-Unis, c’est dire la place considérable prise par le rap sur le marché français du disque. Le rap est devenu une industrie très rentable ; les rappeurs sont de véritables hommes d’affaires et ont même droit à une cérémonie, la Source Hip-Hop Music à Los Angeles, en leur honneur. La musique hip-hop dispose également d’un magazine de qualité " The Source ", le magazine de la culture hip-hop (qui vient de dépasser " Rolling Stone " en termes d’exemplaires vendus).

Face à la déferlante du rap, les maisons de disques ont compris dès le début des années 90 l’intérêt de créer un label rap mais ont quelques difficultés à gérer une telle profusion de groupes, souvent peu respectueux des règles contenues dans les contrats.

Conscients des profits qu’ils génèrent, les artistes demandent à avoir leur part du gâteau. Nombreux sont les chanteurs qui se lancent dans la production que ce soit aux Etats-Unis ou en France avec le secteur A (Pit Baccardi, Arsenik...)  une des principales maisons de production et d’édition du marché rap.

Mais ce qui reste le meilleur business pour la promotion du rap sont les labels.

 

Qu’est qu’un label de musique ?

Un label rap signifie en Anglais « étiquette ». Un label musique correspond à la production musicale d’un album, d’une compilation où d’une comédie musicale. Le label est une personne morale : c’est une société de capitaux (une entreprise) qui a pour objet social la création, l’édition, la production et la diffusion de musique. Concrètement il s’agit d’une maison de disque. Il existe des centaines de labels mais 20% d’entre eux réalisent plus de 80% du chiffre d’affaires de la musique.

 

 

Label créé par Eminem en 1999 et affilé avec le label de Dr Dre; Aftermath

A quoi sert un label rap ?

Le label musique correspond à l’entreprise qui produit les artistes. Dans la majorité des cas, les artistes qui commencent dans le domaine de la musique sont dépourvus de moyen, ils ont besoin d’aide pour produire leurs Å“uvres musicales. C’est précisément le cas d’ASAP Rocky : il avait 3.000 $ sur son compte bancaires et a signé chez Sony music pour produire ses chansons. Comme il était dans une vague où les artistes « nouveaux Â» étaient particulièrement convoités il a négocié un ticket de 3 millions de dollars à la signature.

 

L’utilité d’un label rap est de concevoir, produire un artiste et assurer la promotion de son œuvre jusque dans la campagne de communication du disque. L’artiste produit ses titres dans des locaux appartenant au label (ou loué par celui-ci) et peut enregistrer sans débourser d’argent. Si l’artiste est prometteur, il pourra être convoité par d’autres labels et sera en meilleure position pour négocier son contrat.

 

Quel est le travail d’un label ?

Le label musique à pour mission d’assurer la totalité du processus de fabrication :

  • Conception

  • Fabrication

  • Distribution

  • Campagne de communication

  • Gestion des livraisons

 

Comment les labels gagnent t-ils de l’argent ?

L’objectif numéro 1 d’un label musique est de gagner de l’argent grâce aux productions de l’artiste à la manière de l’industrie de l’édition.  La société spécialisée en musique prend le risque de l’aventure entrepreneuriale et la commercialisation des disques. En rémunération de ce risque, le label jouit d’une partie plus importante des revenus de ces disques : les contrats sont négociés entre artiste et société de production. Les artistes et les labels sont une relation commerciales qui peut prendre plusieurs formes : ventes de musique, ventes de produits dérivés, organisation de concerts, festivals, manifestations et parfois même contrats publicitaires. La collaboration que prendre le label avec l’artiste dépend des droits d’auteurs que l’artiste laisse au label rap.

 

Les deux contreparties sont dans une relation que l’on peut qualifier de gagnant/gagnant c’est-à-dire que si l’artiste produit un succès musical et commercial, le label de musique engrangera des revenus dont une partie sera payés à l’artiste. C’est exactement le cas du label Cash money records où le propriétaire Birdman génère énormément de cash grâce aux productions de ses artistes comme Nicky Minaj, Lil Wayne, etc.

 

Qu’est qu’un major ?

Les majors de la musique sont les labels internationaux, structurés de manière à avoir une force de frappe qui leur permet d’acheter les labels qui sont prometteurs. Ce sont des sociétés de tailles internationales et qui regroupent de nombreux labels. Ces majors sont les entreprises suivantes :

 

Universal music (contrôlé par Vivendi en France)

SonyMusic (contrôlé par Sony Corporation au Japon)

Warner (contrôlé par Time Warner Inc aux Etats-Unis)

Universal music a fait l’acquisition d’EMI en fin 2011 pour un montant de 1,4 milliards d’euros. Du coup, les majors de la musique ne sont plus 4 mais 3 depuis cette date.

 

Ces trois labels forment ce qu’on appelle couramment « les majors de la musique » et contrôlent la majorité du marché de la musique en France. Ces 3 sociétés mères possèdent de nombreux labels associés. Prenons en exemple le cas de Sonymusic. La société Sony Music Entertainment est une société américaine qui détient les labels ARISTA France, Columbia, Jive Epic, Legacy, Sony Classical, RCA Red Seal, DHM, SMART. La liste est longue et chaque label rap dispose d’un thème de musique différent, une stratégie différente, des moyens différents.

 

De plus, ces groupes sont des groupes internationaux où la musique représente seulement une partie de leurs activités. Prenons l’exemple de Universal, Universal produit de la musique via sa filiale Universal Music mais aussi du cinéma via Universal pictures et même des parcs d’attractions avec Universal Orlando Resort.

 

 

Le pouvoir des majors de la musique

Les majors se sont regroupés –avec de nombreux autres labels musique– autour d’une association professionnelle qui défend les intérêts de la vente de musique en France. Cette association s’appelle la SNEP, Syndicat National de l’édition Phonographique. La SNEP produit un classement hebdomadaire, mensuel, semestriel et annuel des ventes de musiques en France. La SNEP est garante de la véracité des résultats et octroie les récompenses de la musique que sont les certifications : disque d’or, disque de platine, disque de diamant.

 

Les majors utilise cette association professionnelle pour faire du lobbying auprès des personnalités politique mais l’use aussi pour mettre une pression (venant de la majorité de l’industrie de la musique) sur les individus qui les menaces. Pour exemple, en janvier 2013, la SNEP a mis la pression sur YouTube (YouTube est une société du groupe Google Incorporation) pour retirer toutes les musiques venant de ces labels car les contrats publicitaires n’étaient plus à jour et donc les labels ne percevaient pas de royalties sur les vidéos présentes sur YouTube.

 

Economie de la musique

 

Aujourd’hui la musique est produite en majorité par les majors qui font en sorte de produire uniquement des succès commerciaux parfois au dépend de la qualité et de la profondeur des textes comme nous vous en avons parlé précédemment.

N°1 mondial de la musique : Universal music (société de label musique)

N°2 mondial de la musique : Sony music (société de label musique)

N°3 mondial de la musique : Warner music (société de label musique)

Heureusement, depuis l’avènement des réseaux sociaux et de la démocratisation de l’internet, les artistes ont besoin de moins d’argent pour produire de la musique. On trouve alors des artistes qui s’autoproduisent de plus en plus et qui arrivent à se faire connaître grâce à l’internet.

 

Au-delà de ce phénomène, on remarque que l’arrivé du financement participatif dans le domaine de la musique (et des films). Cela est également une solution pour essayer de sortir des artistes de l’anonymat.

 

 

En conclusion on peut remarquer qu’en l’espace d’une décennie l’industrie du rap s’est énormément transformée, on parle maintenant de rap « Business Â», beaucoup de rappeurs en profitent et touchent des sommes colossales, on parle ici en millions de dollars. Les grandes industries (Universal Music, Sony Music et Warner Music) de la musique ont été les premiers à prendre conscience de l’ampleur de l’évolution du rap et ont donc sus en tirer profit. Du fait de cette évolution, les rappeurs ont changés leurs styles pour pouvoir « Ã©largir Â» leurs publics, touchés un plus grand nombre de personnes et donc touchés plus d’argent. C’est le rap commercial. Et à cause de cette situation le rap se rapproche de plus en plus de la pop. Ces personnes ne réfléchissant qu’en Euros ne se préoccupent pas forcément des principes de notre art favori. Un artiste comme Maitre Gims par exemple représente donc le Saint Graal pour eux.

Aujourd’hui, en 2015, le rap dans son ensemble s’est énormément commercialisé et beaucoup de rappeur cherche à tirer profit, le but est donc de sortir des musiques en l’espace de peu de temps, ils n’hésitent pas à « mâcher Â» leurs textes, et beaucoup de rappeurs ne font plus attention à leur écriture, ce qui, il y a une quinzaine d’années, était la base de la construction d’un « bon rap Â».

 

Analyse de textes

A partir de cela, nous pouvons ainsi montrer la différence du rap entre aujourd’hui et il y a 10-15 ans, les textes ne sont plus du tout censés, écrit le plus vite possible histoire de pouvoir sortir son titre et encaisser l’argent.

 

IAM demain c’est loin. Produit par Shurik'n, le morceau était initialement prévu pour son album solo, sorti l'année d'après. Finalement Akhenaton avait un texte qui collait parfaitement avec celui de Shurik'n, ils ont enregistré le morceau et l'ont intégré à L’École du micro d'argent.

« Demain c'est loin classé plus grand morceau de l'histoire du Rap français

Selon le très sérieux classement "les 100 classiques du Rap français", édité par l'abcdrduson, le morceau "Demain c'est loin" est le plus grand classique du rap hexagonal.

L'analyse du morceau est également très élogieuse: "Flows métronomiques, instrus au rythme mécanique que rien ne semble pouvoir troubler... Certains morceaux de rap sont comme des trains. Celui de 'Demain c'est loin' ne traverse que des paysages désolés : carcasses de voitures désossées, forêts de ciment, nuées de mômes shootant dans un ballon à l'ombre des tours. Depuis douze ans, le décor ne change pas. Pourtant on ne peut s'empêcher d'y remonter, presque comme un rituel, pour faire le même trajet de neuf minutes en neuf minutes, inlassablement."

A noter que 7 morceaux du groupe IAM sont également mis en avant dans ce classement: l'empire du coté obscure (61ème), l'enfer (58ème), Manifeste (26ème), La Fin de leur monde (22ème), Né sous la méme étoile (20ème), Petit Frère (11ème) et Demain, c'est loin (1er) Â»

Hors format, de par sa durée de 9 minutes, la première partie du texte est écrite en anadiplose : chaque phrase commençant par le dernier mot de la précédente. Ce morceau a la particularité de contenir de nombreux bruitages en rapport avec le texte, lui donnant une réalité encore plus frappante.

« Je parle du quotidien, écoute bien

Mes phrases font pas rire

Rire, sourire, certains l'ont perdu Â»

De son côté, Akhenaton construit beaucoup de ses propos comme des phrases nominales, sans verbe conjugué. Pour ainsi rendre le texte « juxtaposé Â», c’est-à-dire un enchaînement d’adjectif et de complément de noms pour ainsi rendre plus fort la dénonciation : « Princesses d'Afrique, fille mère, plastique

Plein de colle, raclo à la masse lunatique

Economie parallèle, équipe dure comme un roc Â» On remarque qu’en l’espace de 3 vers, Akenathon n’a utilisé aucun verbe.

Dans cette musique, il est donc clair qu’il y a eu un fort d’écriture extrêmement pur, un texte censé, dénonçant la société, parlant des clichés de banlieues : « Clouer, cloué sur un banc, rien d'autre à faire, on boit de la bière.

On siffle les gazières qui n'ont pas de frère.

Les murs nous tiennent comme du papier tue-mouches.

On est là, jamais on s'en sortira, Satan nous tient avec sa fourche. Â»

 

Cependant, cela ne durera, aujourd’hui, nous avons à du rap purement commercial, aucun effort d’écriture qui fait plus penser à de la pop qu’à du rap.

Comme exemple :  "Je sais que ça fait cliché (...) Mais j'veux le dire juste pour la rime." (Maître Gims, "J'me tire")

 

Et là, force est de constater que ce n'est pas génial. Le texte n'est pas uni. L'impression donnée est une suite de rimes qui n'ont de sens que si on veut bien leur en donner. Contrairement à la musique qui est harmonieuse, le texte n'est pas fluide. Et comme il le chante lui-même, certaines phrases semblent avoir été écrites juste pour la rime. Même si le thème est bon, les lacunes du texte réduisent à zéro la cohérence du titre, la compréhension de la chanson. Et c'est presque dans tout l'album la même chose. C’est ce qu’on appelle du « remplissage Â».

 

Exemple sur le titre "One Shot" :

 

"Il t'a trompé, elle t'a trompé

Ça fait mal, je sais, mais ça va s'estomper

Ici c'est le bled, y'a même pas d’emblème

On t'ramasse à la pelle, personne manque à l'appel."

Ce n'est qu'un exemple, mais il met en évidence les lacunes littéraires des rappeurs à succès de nos jours. Les rappeurs, à l'origine, mettaient plus d'énergie à construire un texte cohérent, précis et compréhensible.

 Or maintenant, le plus important est de construire un titre idéal pour passer à la radio et cueillir les auditeurs. Et si Maître Gims n'est pas un parolier de talent, il en reste un commercial affûté.

"J'vais t'apprendre à vendre du disque" (Maître Gims, "Ça décoiffe")

 

Car sa musique, il ne la compose pas, il la vend et malheureusement il le fait très bien. Les mélodies ne sont pas trop agressives et sonnent bien à l'oreille, les refrains rentrent facilement en tête, et la durée de chaque titre est idéale pour passer en radio. En cela, il a compris les bases d'une chanson efficace.

 

Et puis, on pourrait croire que cet album de Maître Gims est carrément un nouvel album de Sexion d'Assaut. Une oreille non avertie ne saurait y voir la différence. Et ce car il est conçu de la même façon. Maître Gims se sert d'une méthode qui marche, qui a fait ses preuves. Et il semble vouloir l'utiliser jusqu'à l'overdose. Son public n'en sera pas dépaysé et le succès continuera.

 

Maître Gims reste dans la facilité, se repose sur ses lauriers, et semble vouloir à tout prix éviter la prise de risques. Et pourquoi le ferait-il face au manque d'exigence d'un public prêt à accepter tout ce qu'on lui sert.

Ainsi, pour résumer on peut dire : le rap n'est pas à l'honneur dans ce succès, mais le public ne réclame pas mieux. Alors pourquoi faire plus ?

 

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